Nous sommes en 2023 et le temps humide rend le chargement de céréales difficile pour le port le plus achalandé du Canada, ce qui peut devenir un gros problème quand on sait que Vancouver enregistre une moyenne de plus de 160 jours de pluie par année. Ça ne veut pas dire que c’est impossible, nous sommes en 2023 après tout. Des protocoles et des processus ont été mis en place pour permettre le chargement de céréales durant les intempéries. Pourquoi ça ne se passe pas plus souvent?
En bout de compte, chaque entreprise céréalière prend des décisions opérationnelles et commerciales sur quand et comment charger ses céréaliers. Ces entreprises décident également d’investir ou non dans l’infrastructure et la technologie qui pourrait remédier aux problèmes en lien avec la pluie (p. ex. un toit).
Les solutions existent. Pourquoi ne sont-elles pas appliquées plus souvent?
En février 2018, une décision arbitrale prise par le Conseil canadien des relations industrielles a mis un terme à l’usage de bâches pour recouvrir les cales lors du chargement de céréales. Le chargement des céréales par les orifices (ouvertures dans les panneaux de cale du navire spécialement conçues pour les goulottes de chargement) a également été interrompu temporairement jusqu’à la mise en œuvre possible d’autres mesures de sécurité. Depuis l’implantation des nouveaux protocoles de sécurité, les chargements par les orifices ont été limités. Dans plusieurs cas, les observateurs de l’industrie ont remarqué qu’une entreprise céréalière choisira de ne pas charger lorsqu’il pleut à cause du temps et de l’effort additionnel lié aux nouveaux protocoles.
D’autres moyens pour le chargement de céréales par les orifices existent et sont utilisés présentement. Par exemple, le terminal d’exportation de céréales de Temco, situé à Kalama (WA), a investi dans un toit en porte-à-faux contre la pluie d’une taille d’environ neuf dixièmes d’acre.
Crédit photo: Port de Kalama
Crédit photo: Port de Kalama
Les répercussions réelles sur les agriculteurs
Cette situation affecte les résultats des agriculteurs et réduit dans l’ensemble la capacité de la chaîne d’approvisionnement de céréales du Canada. Par exemple, le CN avait plus de 20 trains céréaliers stationnés le long de la route vers Vancouver en octobre dernier à cause des problèmes de productivité du terminal causés par les pluies incessantes. Durant les quatre semaines précédant les intempéries, les expéditions hebdomadaires de céréales provenant de l’Ouest canadien par le CN étaient d’en moyenne 760 000 tonnes métriques. Entre les semaines 13 et 15 de la campagne agricole, le total des envois de céréales par le CN était en moyenne de 289 000 tonnes métriques (une chute de plus de 60 %), ce qui représente 275 000 acres de production céréalière dans l’Ouest canadien.
Ces retards ont des répercussions sur toute la chaîne d’approvisionnement. Au cours de la semaine 15 de la campagne agricole, la chaîne d’approvisionnement de céréales s’engorgeait. À cause de l’espace restreint aux terminaux d’exportation, le rythme des livraisons de céréales par les agriculteurs a baissé de 30 % (soit plus de 400 000 tonnes métriques) en comparaison à la moyenne des semaines 9 et 12 de la campagne agricole.
En fin de compte, la chaîne d’approvisionnement céréalière de bout en bout souffre si la productivité des terminaux portuaires diminue. Si l’espace dans les terminaux portuaires n’est pas disponible pour décharger les céréales des wagons, les trains céréaliers chargés ne peuvent être acheminés. Chaque train retenu retarde le retour des wagons-trémies vides dans les Prairies. La réduction de wagons-trémies disponibles a une incidence sur le programme de mise en place du CN pour la semaine suivante et sur l’espace disponible dans les silos à grains pour les livraisons de céréales des agriculteurs.
Un meilleur compte rendu de la chaîne d’approvisionnement des céréales de bout en bout est nécessaire
Malheureusement, les rapports du secteur céréalier en lien avec le déclin dans l’exécution des commandes de wagons-trémies ne prennent pas en compte la source même du problème. Les systèmes de mesure actuels se concentrent sur les chemins de fer lorsqu’une diminution dans l’exécution des commandes est détectée, ce qui empêche d’avoir une vue d’ensemble de ce qui arrive dans nos chaînes d’approvisionnement en céréales. Les agriculteurs de l’Ouest canadien sont de plus en plus inquiets par rapport à cette approche unilatérale.
Une occasion
Si le Canada espère améliorer le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement, nous devons changer la manière dont nous mesurons et communiquons les données. Nous avons besoin d’une approche, qui repose sur les faits et qui prend en considération tous les éléments de la chaîne d’approvisionnement. Des mesures améliorées nous aideront à mieux comprendre ce qui se passe quand des problèmes surviennent et à régler ces derniers ensemble. Faites en sorte que le chargement sous la pluie ne soit plus qu’un mauvais souvenir. Demandez à la direction du nouveau Bureau de la chaîne d’approvisionnement des transports de mettre ces systèmes en place.
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