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16 JUIN 2023

L’évolution du traitement des céréales et du réseau de silos primaires dans l’Ouest canadien

Certains voudraient vous faire croire que toutes les céréales cultivées dans l’Ouest canadien sont « captives » de tel ou tel chemin de fer; cette affirmation est trompeuse.

En fait, 100 % des installations de manutention et de traitement des céréales dans l’Ouest canadien ont accès à plus d’un transporteur ferroviaire. Avant d’analyser cette affirmation plus en profondeur, examinons le paysage concurrentiel du secteur de la manutention et du traitement des céréales dans l’Ouest canadien.

Tout commence par un camion

Si l’on pense au réseau de manutention des céréales des années 1980, on imagine un camion de trois tonnes transportant six ou sept tonnes de céréales sur une distance de cinq ou dix milles jusqu’à un silo à grains en bois. Les céréales de l’agriculteur étaient généralement acheminées vers une seule entreprise de manutention des céréales.

Le camion de trois tonnes a été remplacé par le Super B, qui transporte 40 tonnes métriques de céréales ou plus sur des distances beaucoup plus grandes. La disponibilité de camions de plus grande capacité et les économies d’échelle qui en découlent ont créé des possibilités pour les producteurs de céréales. Aujourd’hui, les agriculteurs ont accès à de multiples sociétés céréalières desservies par différents transporteurs ferroviaires. Près de 85 % du réseau de silos primaires des Prairies se trouve à moins de 50 milles d’une installation de manutention des céréales située sur un autre réseau ferroviaire ou desservie par plus d’un transporteur ferroviaire. Les agriculteurs disposent ainsi d’options qu’ils n’avaient pas dans les années 1980.

Ce nouveau système est le résultat de nombreux investissements privés. L’investissement dans l’infrastructure de manutention des céréales des Prairies a véritablement décollé au début des années 2010, lorsque le gouvernement a supprimé la Commission canadienne du blé. Les agriculteurs ont investi dans des semi-remorques et dans l’entreposage à la ferme. Les entreprises céréalières investissent dans des silos de grande capacité, dont un bon nombre sont sur des voies en boucle, permettant la mise en place de plus de 150 wagons. Les compagnies ferroviaires ont investi dans de nouvelles locomotives et des wagons-trémies de grande capacité, remplaçant les wagons-trémies obsolètes appartenant au gouvernement. La déréglementation stratégique a directement soutenu les investissements et les gains d’efficacité dans la chaîne d’approvisionnement en céréales.

L’évolution spectaculaire vers le traitement des céréales dans les Prairies

Le fait de se concentrer uniquement sur les changements dans le réseau de silos primaires ne rend toutefois pas justice au secteur céréalier. Le secteur de la transformation des oléagineux de la région est aujourd’hui un énorme marché de destination pour les graines de canola. Depuis la construction de la première usine de trituration de colza au milieu des années 1940 en Saskatchewan, la capacité annuelle du secteur de la transformation des oléagineux est passée à plus de 9 millions de tonnes métriques (MMT). De ce volume, plus de 6 millions de tonnes sont pris en charge par deux chemins de fer. Il en va de même pour l’industrie brassicole, dont trois des quatre malteries des Prairies sont doublement desservies.

Si l’on combine le réseau de silos primaires avec la transformation du canola et du malt à l’échelle nationale, plus d’un quart des céréales de l’Ouest canadien est directement accessible par plusieurs transporteurs ferroviaires. Pour les agriculteurs, qui disposent de moyens de transport modernes, les options sont encore plus nombreuses. L’époque où les agriculteurs étaient des « expéditeurs captifs » est révolue.

La déréglementation partielle des tarifs ferroviaires a révolutionné le système de manutention des céréales dans les Prairies

Le secteur céréalier canadien a beaucoup évolué. Des années 1930 aux années 1980, le réseau de silos primaires des Prairies a stagné, reposant notamment sur des milliers de silos à grains en bois inefficaces et des investissements limités en matière d’infrastructure. La réglementation gouvernementale sur les tarifs marchandises, notamment des céréales, à savoir le taux du Nid-de-Corbeau, a étouffé les investissements dans l’infrastructure ferroviaire et a freiné le développement d’infrastructures de manutention des céréales plus modernes par les sociétés céréalières. Le gouvernement a finalement été contraint d’utiliser l’argent du contribuable pour combler le déficit d’investissement dans les années 1970, en lançant un programme de construction de wagons-trémies.

Dans les années 1980, le gouvernement a enfin commencé la déréglementation, un processus qui a culminé avec l’abrogation de la Loi sur le transport du grain de l’Ouest (et la fin du tarif du Nid-de-Corbeau) en 1995.

En 1999, l’ancien sous-ministre fédéral des Transports, Arthur Kroeger, a recommandé l’introduction d’un droit à un revenu maximal admissible (RMA) — une sorte de plafond de recettes pour les chemins de fer — afin de faciliter la transition du secteur céréalier vers un marché totalement déréglementé. L’arrivée d’un environnement réglementaire favorable a déclenché un renouvellement à grande échelle du parc de wagons-trémies en 2018. De nouveaux wagons-trémies de grande capacité ont aidé le Canada à suivre le rythme de croissance des volumes de production de l’agriculture moderne.

Malheureusement, une nouvelle intervention réglementaire du gouvernement menace aujourd’hui de mettre en péril ces acquis.

La solution? Moins de réglementation

Le rapport Emerson, une étude de 500 pages achevée en 2015, recommandait de mettre fin au prolongement de la limite d’interconnexion, car elle étouffait les investissements privés dans les infrastructures, et d’éliminer le droit à un revenu maximal admissible (RMA) pour les céréales, qui entraîne des distorsions du marché.

L’interconnexion pour les longues distances était la solution proposée par le gouvernement pour résoudre les problèmes liés au prolongement de la limite d’interconnexion. Elle a permis à 100 % des actifs de manutention et de traitement des céréales des Prairies d’accéder à plusieurs transporteurs ferroviaires.

Pourtant, aujourd’hui, le gouvernement veut rétablir le prolongement de la limite d’interconnexion, et le plafond des recettes demeure en place. Le fait que cette mesure ne s’applique qu’aux trois provinces des Prairies démontre qu’il ne s’agit pas d’une politique de la chaîne d’approvisionnement fondée sur des données probantes.

Le prolongement de la limite d’interconnexion signifie que plus de ressources sont requises pour transporter le même volume de marchandises. Cela ralentit le réseau. Un client qui souhaite recourir au prolongement de la limite d’interconnexion sur une ligne ferroviaire déjà saturée crée des embouteillages et nuit à tous les usagers de cette ligne. À mesure que l’efficacité du réseau ferroviaire diminue, les coûts augmentent dans TOUS les segments du trafic ferroviaire, y compris les céréales réglementées. Il faut s’attendre à une augmentation des coûts, et non à une diminution, en cas de prolongement de la limite d’interconnexion.

Résumé

Le CN estime qu’il existe d’énormes possibilités de développer la chaîne d’approvisionnement en céréales du Canada. La Compagnie investit dans son réseau et travaille à l’amélioration des performances de la chaîne d’approvisionnement en collaborant avec les clients et en adoptant une approche factuelle pour optimiser l’efficacité de bout en bout. La réglementation liée au prolongement de la limite d’interconnexion, qui est fondée sur des données incomplètes et des preuves anecdotiques ne fera, encore une fois, qu’étouffer les investissements et restreindre la capacité de la chaîne d’approvisionnement, limitant ainsi le potentiel de croissance du secteur. L’histoire montre que la déréglementation est le meilleur moyen de développer l’économie.

Si le Canada espère améliorer le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement, nous devons également changer la manière dont nous mesurons et communiquons les données. Une approche équilibrée prenant en compte tous les maillons de la chaîne d’approvisionnement aidera les décideurs à mieux comprendre ce qui se passe lorsque des problèmes surviennent et pourquoi. Le gouvernement et le secteur doivent assurer la transparence de tous les éléments de la chaîne d’approvisionnement en céréales de bout en bout. Tous les maillons de la chaîne doivent travailler ensemble pour donner des résultats. Il est temps de mesurer les performances d’une nouvelle manière.

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